Capture de l'U-505
- Bien avant sa capture, l'U-505 a connu une série de
malchances et de malheurs presque incroyable. On peut dire que
cela commence en Juin 1942 dans les Caraïbes, lorsque le
commandant de l'époque, Axel-Olaf
Loewe, voit sa première campagne de guerre comme
commandant se terminer de manière dramatique par une
maladie. Il demande l'autorisation de rentrer chez lui. De retour
en France, il est immédiatement hospitalisé pour
une inflammation de l'appendice et, n'étant pas
suffisamment rétabli lorsque le bateau est prêt
à reprendre la mer, Peter
Zschech, alors âgé de 24 ans, prend le
commandement. Tout semble aller pour le mieux au début. Il
a appris son métier sur l'U-124 sous la direction de Johann Mohr et débute avec
succès, tout comme Loewe avant sa maladie, mais cette
période de chance ne dure pas longtemps. De retour dans
les Caraïbes, trois jours après avoir coulé un
grand cargo, l'U-505 est presque entièrement
détruit lors d'une attaque précise menée par
un Hudson piloté par le
Flight Sergeant Sillcock. L'explosion détruit toute la
partie arrière du pont supérieur, la transformant
en un enchevêtrement de fer tordu, et fait même
exploser le canon de 37 mm chargé. Il faut déployer
les plus grands efforts pour survivre et maintenir le bateau
à flot. Incapable de plonger, l'U-505 devient
instantanément une cible facile, avec de sombres
perspectives de retour à terre. Heureusement, des secours
sont à portée de main. Un autre U-Boote de
première ligne, l'U-68,
commandé par Karl-Friedrich
Merten, fournit des pièces de rechange vitales, et
l'U-462, un Type XIV
(Milchkühe) spécialement conçu et
commandé par Bruno Vowe,
amène un médecin et une quantité abondante
de morphine pour soulager les souffrances de plusieurs
blessés.
- Bien qu'il ne soit encore qu'une épave dont seule une
partie est réparée, l'U-505 réussit
à regagner la France, où la malchance continue de
le poursuivre. Après sept mois passés en cale
sèche pour réparation, les essais habituels de
plongée profonde, au début de la traversée
suivante, révèlent quelques problèmes
mineurs qui ne peuvent être réparés à
bord. Zschech n'a d'autre choix que de retourner à
Lorient. Les quatre missions suivantes doivent également
être interrompues peu après leur départ, en
raison de défauts mécaniques cachés de
toutes sortes. Cela est non seulement frustrant pour les hommes
de l'U-505, mais oblige également le commandant du
chantier naval à examiner les procédures de travail
des équipes de réparation. Certains ouvriers
français sont reconnus coupables de sabotage et
condamnés à mort par un peloton
d'exécution.
- Le voyage suivant, qui débute le 09 Octobre 1943,
rencontre également des problèmes. Deux semaines
après avoir quitté Lorient, l'U-505 est
victime d'une attaque dévastatrice aux charges de
profondeur lancée par un navire de surface. Zschech
réagit en se retirant dans sa « cabine » et en
se tirant une balle. Paul Meyer, le premier officier de quart,
qui est à bord de l'U-505 depuis 10 mois mais n'a
jamais passé de longue période en mer, prend les
commandes. Il ne peut guère poursuivre la mission, car le
commandant est la seule personne formée à l'art
complexe de l'attaque. D'une certaine manière, il semble
étrange qu'un seul homme à bord sache comment
procéder. Ce problème lié au fait que le
premier officier n'est pas formé pour remplacer le
commandant aura des conséquences encore plus graves pour
l'U-415.
- Harald Lange, le nouveau commandant, un officier de
réserve, arrive par une journée froide et maussade
de Novembre, alors que le bateau est à nouveau
amarré à Lorient. Il est né le 23
Décembre 1903, ce qui le rend beaucoup plus
âgé que Loewe, qui, à 33 ans, est
déjà considéré comme le «
vieillard » de l'équipage. Le fait qu'à son
âge, Lange n'a que le grade d'Oberleutnant-zur-See
suggère qu'il n'a pas beaucoup d'expérience. Il a
servi dans les Sperrbrecher et dans des patrouilleurs de
type chalutier convertis. Mais ce qui manque à Lange en
grade ou en expérience dans les sous-marins, il le
compense par son caractère jovial et précis.
Étant d'un naturel agréable, il gagne rapidement la
confiance des hommes.
- Son premier voyage est brusquement interrompu par un appel de
détresse, puis par une requête, plutôt qu'un
ordre, du Commandement suprême de la marine demandant
à toute personne se trouvant dans la zone de
récupérer les survivants d'une action navale en
mer. Cet événement n'a pratiquement pas
été mentionné dans les livres d'histoire,
mais il est devenu l'un des événements les plus
émouvants de la guerre. La série
d'événements commence lorsque la 8e flottille de
destroyers et la 4e flottille de torpilleurs prennent la mer pour
escorter le navire de ravitaillement Alsterufer
(Kapitän Piatek), qui tente de forcer le blocus, à
travers le dangereux golfe de Gascogne. Malheureusement pour les
Allemands, Bletchley Park déchiffre suffisamment les codes
radio allemands pour envoyer une force plus puissante de
croiseurs afin de les combattre. L'Alsterufer est d'abord
repéré par un Sunderland, puis coulé par
une roquette tirée depuis un Liberator. Suite à
cela, 74 hommes répartis dans quatre canots de sauvetage
sont récupérés par une corvette canadienne
envoyée à leur secours. La chance continue de
sourire aux Alliés, car les destroyers et les torpilleurs
allemands tombent sur les forces d'interception à un
moment où les conditions météorologiques se
détériorent considérablement, ce qui
empêche les petits navires allemands d'utiliser leur
vitesse supérieure pour échapper aux tirs de leurs
adversaires plus puissants. En conséquence, deux
torpilleurs et un destroyer sont coulés, tandis que
d'autres subissent des dommages considérables et des
pertes humaines importantes.
- L'appel de détresse est capté par les
U-505 et U-618, sous le
commandement de Kurt Baberg, qui
entend également le grondement des canons, mais n'est pas
en mesure d'apporter son aide. Rentrant péniblement
à bon port avec de graves avaries, son bateau a
été battu à plate couture alors qu'il
tentait de franchir le détroit de Gibraltar. Il est
à peine capable de plonger, la plupart des machines, y
compris l'émetteur radio, ne fonctionnent plus et de
nombreux membres d'équipage sont blessés. Sachant
que son bateau ne résistera pas à un nouveau
contact avec l'ennemi, Baberg est plus que réticent
à changer de cap, mais il estime également qu'il ne
peut pas laisser ses collègues mourir en mer. Ne sachant
pas quoi faire et ne voulant pas imposer à son
équipage déjà épuisé une autre
tâche qui semble impossible, il soumet la question au vote,
ce qui est pratiquement inconnu dans un sous-marin. À sa
grande surprise, personne ne s'oppose à la proposition. Le
navire endommagé change donc de cap et a la chance de
trouver 25 survivants du destroyer Z27.
- L'U-505 s'en sort un peu mieux, dans la mesure où
le bateau n'est pas endommagé. La découverte de 34
survivants du T25 justifie le détour et
l'interruption de la croisière, mais en arrivant à
Brest le 02 Janvier 1944, deux jours avant l'arrivée de
l'U-618 à Lorient, l'U-505 connaît un
autre de ces incidents frustrants dus à la malchance.
Quatre mois plus tôt, la pompe à ballast principale
avait contraint le sous-marin à regagner le port, et cette
fois-ci, l'un des principaux moteurs électriques tombe en
panne de la même manière, brûlant de
façon spectaculaire. L'incendie est maîtrisé
et ne présente aucun danger à proximité du
port. Le principal problème est que ces moteurs ont
été installés avant que le sous-marin ne
soit construit autour d'eux. Ils sont plus grands que les
panneaux et ne peuvent être retirés ou remis en
place sans mesures drastiques. Il n'y a pas d'autre choix.
L'U-505 doit rester à quai pendant une longue
période. Là, un énorme trou est
découpé dans la coque épaisse et dans les
ballasts qui l'entourent, puis tout doit être
ressoudé. C'est une entreprise coûteuse et longue,
mais elle donne l'équipage l'occasion de prendre un
congé imprévu et ce n'est qu'à la mi-Mars
1944 que le bateau prend la mer pour sa dernière mission
de guerre.
- Les événements qui conduisent à la capture
de l'U-505 sont décrits de manière
très précise par le commandant, Harald Lange, dans
un rapport d'interrogatoire qu'il rédige à bord du
porte-avions U.S.S. Guadalcanal. C'est vers midi, le 04
Juin 1944, deux jours avant le débarquement en Normandie,
lorsque l'opérateur radio signale que de faibles bruits
d'hélices deviennent de plus en plus forts. En se
concentrant sur ces sons à peine audibles, il devient
rapidement évident qu'il y a plus d'une source, et le
sifflement aigu du moteur d'un navire de guerre, plutôt que
le bruit caractéristique des navires marchands,
suggère que l'U-505 est pris au piège dans
une position peu prometteuse. Après avoir remonté
le bateau à l'immersion périscopique, Lange
distingue trois destroyers et quelque chose de beaucoup plus
grand derrière eux. Il aperçoit également un
petit avion monomoteur, ce qui suggère que l'énorme
coque au loin était un porte-avions. Il n'ose pas prendre
le risque d'observer la scène trop longtemps.
Suite et fin de
l'histoire.
Glossaire
Source : ENIGMA U-BOATS Breaking the Code (avec mes propres
corrections).
