H.M.C.S "St Croix" (ex U.S.S. "McCook")


H.C.S.M. St Croix (© BfZ)
H.M.C.S. "St Croix" (© BfZ)"

Type
Clemson Class Destroyer sous pavillon U.S. (U.S.S. "McCook" DD-252)
St Croix River sous pavillon Canadien (H.M.C.S "St Croix" I-81)
Chantiers de Construction
Bethlehem Shipbuilding Corporation, Fore River Shipyard, Quincy
Mise sur cale
10 Septembre 1918
Lancement
31 Janvier 1919
Terminé
30 Avril 1919
Mise en service dans la Marine Canadienne
24 Septembre 1940
Caractéristiques techniques
Longueur : 95,83 mètres
Largeur : 9,65 mètres
Tirant d'eau : 2,82 mètres
Déplacement : 1190 tonnes
Puissance installée
26500 cv
Propulsion
2 turbines à vapeur à engrenages
2 hélices
Vitesse maxi
35 nœuds
Autonomie
4900 nautiques à 15 nœuds
Armement
4 × canon de 102mm
3 × canon antiaérien de 76mm
12 × tube lance-torpilles de Ø 533 mm
Équipage
122
Commandant
Lt Cdr A. H. Dobson D.S.C. RCNR
Victimes/Survivants
67 sur le St Croix, 80 du Itchen/1


- L'U.S.S "McCook" (DD-252) est mis sur cale au chantier naval de la Bethlehem Steel Corporation à Quincy, Massachusetts, en Septembre 1918, lancé en Janvier 1919 et mis en service dans la marine américaine le 30 Avril de la même année. Après sa croisière d'essais, le "McCook" est affecté à la Destroyer Force, Atlantic Fleet avec laquelle il sert le long de la côte Est jusqu'à ce qu'il soit désarmé en vertu du traité de Washington en Juin 1922. Le "McCook" passe les années de l'entre-deux-guerres désarmé à Philadelphie avec la plupart des bâtiments de sa classe avant de rejoindre la flotte de l'Atlantique en Décembre 1939. Il y reste jusqu'à ce qu'il soit remis aux Britanniques à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en Septembre 1940. Rebaptisée "St Croix", il est affecté dans la Royal Canadian Navy le 24 Septembre, avec six autres "flush-deckers", et se fait les dents dans le cadre d'une mission d'escorte locale. Le mois suivant, le "St Croix" est convertie en 'long range escort' à l'arsenal de Devonport. Le 30 Novembre, alors qu'il navigue vers la Grande-Bretagne, le "St Croix" n'est pas loin de St John's, à Terre-Neuve, lorsqu'un ouragan l'oblige à rentrer au port et à se rendre à Halifax, en Nouvelle-Écosse, pour y être réparé et réaménagé. Il en ressort en Mars 1941, d'abord affecté à des tâches d'escorte locales à Halifax, puis en Avril au Canadian 21st Escort Group (EG-C21) de la Newfoundland Escort Force, chargé de conduire les convois entre St John's et l'Islande. Le carénage complet a finalement lieu à Saint John, au Nouveau-Brunswick, entre Septembre 1941 et Avril 1942, après quoi le "St Croix" est affecté à des tâches au sein de la Mid-Ocean Escort Group Force. Le 24 Juillet 1942, l'U-90 est coulé en attaquant le convoi ON 113 par le "St Croix", mais en Septembre, ce dernier, récemment affectée au Canadian 4th Escort Group (EG-C4), est lors de la destruction du N.C.S.M. "Ottawa" par l'U-91 alors qu'il escorte le convoi ON 127. En Octobre, il est affecté au Canadian 1st Escort Group (EG-C1). En Novembre et Décembre il est en carénage à St John's suivi en Janvier et Février 1943 d'un entraînement intensif avec l'EG-C1 au H.M.S. "Western Isles", l'école anti-sous-marine de Tobermory, en Écosse. Les dividendes sont récoltés le 04 Mars lorsque le "St Croix", qui escorte alors le convoi KMS 10 au large du Portugal, participe à la destruction de l'U-87 avec la corvette H.M.C."Shediac". Après des réparations à Halifax en Juin, le "St Croix" retourne dans la mêlée et est affecté en Juillet au Canadian 9th Support Group (SG-9) nouvellement formé, basé à Londonderry. Bien que destinée aux opérations contre les U-Boote transitant dans le Golfe de Gascogne, cette unité semble avoir été confinée à des tâches de convoi dans l'Atlantique.

- Au début de l'été 1943, la lutte entre la U-Boot-Waffe et les forces alliées dans l'Atlantique Nord devient une affaire unilatérale. Bien que les U-Boote continuent à combattre, pas moins de cinquante-trois d'entre eux sont perdus dans l'Atlantique en Avril et Mai, un coup dévastateur qui fait prendre conscience à tous au B.D.U. des progrès réalisés par les Alliés tant en tactique que dans la technologie, même si une grande partie de cette dernière reste inconnue. Les U-Boote sont retirés de leur principal champ de bataille et ils ne coulent pas beaucoup dans l'Atlantique Nord entre Juin et fin Septembre 1943. Cependant, la bataille de l'Atlantique n'est pas terminée. Une nouvelle arme entrait dans sa phase finale de développement en Allemagne : la torpille acoustique T5, connue par les Allemands sous le nom de "Zaunkönig" et par les Alliés sous l'acronyme GNAT (German Naval Acoustic Torpedo). En évitant au commandant d'un U-Boot d'avoir à acquérir une inclinaison favorable (angle relatif) sur sa cible, le "Zaunkönig" lui donne pour la première fois un moyen efficace d'engager une escorte en approche rapide. Avec une portée de 5700 mètres et une vitesse de près de vingt-cinq nœuds, le "Zaunkönig" présente son plus grand danger pour les navires naviguant entre huit et vingt nœuds; plus lents, ils ne produisent pas assez de bruit pour attirer la torpille; plus rapides, ils tendent à contrer la trajectoire sinueuse du T5.

- En Septembre, le B.d.U. forme le groupe "Leuthen" (nommé d'après une célèbre victoire de Frédéric le Grand) comprenant vingt et un bateaux naviguant à partir de bases françaises et norvégiennes équipés de la torpille "Zaunkönig" et chargés de rouvrir les hostilités contre les convois alliés. Parmi eux se trouvait l'U-305 (K.L. Rudolf BAHR), équipé non seulement de quatre torpilles T5 mais aussi du dernier système d'alerte radar" Wanze" ainsi que de canons de flak doubles et quadruples pour compenser l'avantage aérien décisif dont jouissent les Alliés. Le premier convoi localisé par le groupe est le ON 202 qui navigue en direction de l'Ouest. L'U-270 (K.L. Paul-Friedrich OTTO) enregistre la première utilisation opérationnelle du "Zaunkönig", détruisant la poupe de la frégate H.M. "Lagan" aux premières heures du 20 Septembre. Avec deux autres attaques contre des marchands plus tard dans la matinée, cela confirme aux services de renseignement de l'Amirauté que les sous-marins lancent une offensive majeure en s'appuyant sur les nouvelles technologies. La décision est donc prise de fusionner les convois ON 202 et ONS 18, plus lent, un processus laborieux nécessitant de nombreuses heures pour former une masse encombrante de soixante-dix navires mais qui est assuré néanmoins de la présence d'une escorte extrêmement puissante de vingt navires. Il comprend le Canadian 2nd Escort Group (EG-C2; deux destroyers, trois corvettes - dont le H.M.S. "Polyanthus" et un chalutier), le 3rd Escort Group (cinq corvettes et un destroyer, une frégate et un chalutier) et le Canadian Support Group (SG-9 ; deux destroyers dont le "St Croix", trois corvettes et la frégate H.M.S. "Itchen") ainsi que la couverture aérienne assurée par le porte-avions marchand H.M.S. "Empire MacAlpine". Au crépuscule du 20ème jour, le H.M.C.S. "St Croix" est détaché avec l'"Itchen" et la corvette "Narcissus" pour chasser un U-Boot aperçu par un "Liberator" de la R.C.A.F. à l'arrière du convoi. Guidé vers la position par cet avion (auquel Bahr fait référence dans ses entrées du K.T.B. pour 21h05, 21h08 et 22h30) et maintenant hors de vue de l'escorte restante, le "St Croix" est poursuivi par l'U-305 en plongée peu avant 20h00 heure alliée (22h00 heure de l'U-Boot).
- Extrait du KTB de l'U-305



- Il est difficile d'établir une image précise de ce qui est arrivé au H.M.C.S. "St Croix" à la suite de la torpille de l'U-305, car pratiquement aucun n'a survécu assez longtemps pour raconter l'histoire. Cependant, les preuves qui existent corroborent le rapport de Bahr sur une double explosion. La R.C.N. a raisonnablement mais erronément supposé qu'il s'agissait de deux torpilles qui avaient explosé à l'arrière, bien que les comptes-rendus allemands et alliés fassent référence aux explosions de charges de profondeur qui ont manifestement aggravé les dommages. D'après le témoignage du seul survivant, le soutier William Fisher, le "St Croix" a immédiatement pris de la bande avec ses moteurs arrêtés. Les avaries étaient clairement suffisantes pour qu'une majorité de l'équipage reçoivent l'ordre de rejoindre la baleinière du destroyer, le bateau à moteur et les flotteurs Carley, mais selon pour Fisher, il était clair que le commandant Dobson avait encore un certain espoir de garder le "St Croix" :

    - Nous avions plusieurs garçons à bord quand nous avons vu de la fumée s'élever des cheminées 1 et 2. Personne ne pouvait comprendre pourquoi la fumée montait car elles avaient tous deux été arrêtées avant que nous soyons touchés. On m'a dit plus tard que le capitaine avait donné l'ordre de se mettre en route et de voir s'il pourrait faire route.

- Mais la tentative a été rapidement stoppée par le coup de grâce du Bahr, tiré à 22h44 heure allemande (20h44 heure alliée), presque une heure après son premier :

    - La fumée s'élevait depuis environ trois minutes lorsque le H.M.S. "Itchen" est arrivé à l'horizon. Quelques minutes plus tard, il y a eu une terrible explosion et les flammes ont sauté en l'air ... L'arrière du navire a rapidement disparu, mais à partir du milieu du navire [c'est-à-dire la section avant] est resté en place de trois à cinq minutes, puis son étrave a pointé en l'air et est descendue.

- Ce dernier point confirme l'exactitude de la description de Bahr dans son entrée de 22h44, et bien que la chronologie de Fisher s'écarte de celle du KTB de l'U-305 il semble probable qu'au moins certains des bruits entendus par son hydrophone à 23h10 provenaient de la section avant du "St Croix" en route vers le fond de l'Atlantique.
- La frappe de Bahr a illustré le potentiel de la torpille T5 et la B.d.U. a approuvé le fait qu'il ait fait surface pour évaluer ses effets avant de livrer le coup de grâce. Cependant, même ce bref extrait du journal de bord de l'U-305 révèle les lacunes du Zaunkönig depuis l'attaque de 22h53 de Bahr contre l'"Itchen" qui a explosé non pas sur sa coque mais dans son sillage, une faille de sensibilité persistante qui ne serait jamais correctement corrigée.
- Influencé sans doute par les rapports de son opérateur d'hydrophone, Bahr a conclu qu'un second navire de guerre avait été coulé. On attribue à Bahr ce naufrage, le premier d'une longue série de mauvaises interprétations des données acoustiques qui caractérisent les évaluations allemandes des attaques de la torpille T5. Le problème crucial était celui de la corroboration visuelle, puisqu'un U-Boot plongeait généralement après avoir lancé une Zaunkönig pour éviter de devenir la cible de sa propre arme.

- D'après le témoignage du soutier William Fisher, le seul membre de l'équipage du "St Croix" à avoir jamais revu la terre ferme, il semble que seule une poignée d'hommes ont succombé à l'attaque initiale de l'U-305. La plupart d'entre eux se trouvaient sur le pont arrière et ont été tués ou jetés à la mer. Comme l'a raconté Fisher, au cours de la demi-heure qui a suivi, le baleinier du navire a été descendu, les flotteurs de Carley ont basculé sur le côté et les blessés sont descendus dans le bateau à moteur de Sainte-Croix :

   - Le capitaine, plusieurs officiers et matelots étaient encore à bord quand il a été touché la troisième fois [c'est-à-dire la deuxième attaque] et certains d'entre eux ont pu descendre avant qu'il ne coule. Alors que nous continuions à chercher des survivants dans la l'huile était si épaisse que nous pouvions à peine reconnaître certains des garçons.

- Conscient qu'il y a eu une explosion dans son sillage, le Lt Cdr C. E. Bridgeman de l"'Itchen" n'ose s'arrêter pour les survivants mais envoie le message suivant à l'officier supérieur du British 3rd Escort Group, le Cdr M. J. Evans du H.M.S. "Keppel" : "St Croix" a été torpillé et a explosé, le gaillard d'avant est toujours à flot et les survivants sont dans des radeaux et des bateaux, des torpilles me sont tirées dessus. Fais route à toute vitesse dans les environs, mais ne tente pas de recueillir les survivants jusqu’à l’arrivée du H.M.S. "Polyanthus". Cependant, l’arrivée du "Polyanthus" annone non pas le sauvetage des hommes du "St Croix", mais sa propre destruction aux mains de l'U-952. Les survivants des deux navires doivent maintenant attendre qu’il soit suffisamment sûr pour que l'"Itchen" les sauve le lendemain matin. Comme Fisher le rappelle, ceux du baleinier et des quatre flotteurs Carley qui y sont attachés s'en sortent mieux, ne perdant pas un seul homme pendant la nuit. Les moins chanceux sont ceux qui se trouvent dans le bateau à moteur commandé par le First Lieutenant qui se retrouve débordé après avoir embarqué trop d'hommes, ce qui en a poussé plusieurs à paniquer et à l'abandonner, pour ne plus jamais être revus. Repéré par le "Narcissus", l'"Itchen" recueille un total de quatre-vingt-un survivants, mais leur délivrance est trop courte. Dans les premières minutes du 23 Septembre, l"Itchen" est frappé par une torpille 'Zaunkönig' de l'U-666 et explose, une catastrophe dont il n'y a que trois survivants. L'un d'eux, le soutier Fisher du "St Croix", est secouru par le vapeur polonais "Wisla" quelques heures plus tard et finit par débarquer à Brooklyn, New York. Au-delà de la tragédie humaine, le naufrage du "St Croix" prive les Alliés d'un vétéran chevronné de la bataille de l'Atlantique et sa perte porte un coup dur à la Marine royale canadienne.



Libre traduction par l'auteur du site des pages 338,339, 340 et 341 de l'ouvrage "U-Boat Attack Logs" de Daniel Morgan & Bruce Taylor chez Seaforth Publishing.
Sources : le Net


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