Les ports Mulberry
- Les planificateurs alliés ont
compris dès le départ qu'ils n'y aura pas de port
disponible dans la zone de débarquement prévue pour
acheminer les énormes quantités de ravitaillement
nécessaires pendant une longue période. C'est
pourquoi, en Août 1943, le SHAEF (Supreme Headquarters
Allied Expeditionary Force) commence à concevoir deux
ports artificiels. Chacun aura la capacité du port de
Douvres et sera prêt quelques jours après
l'invasion. Le port Mulberry A sera mis en place au large
du village de pêcheurs français de Vierville-sur-Mer
par les Américains, le port Mulberry B à
Arromanches par les Britanniques et les Canadiens. Le Rear
Admiral W.G. Tennant est chargé de faire remorquer le
matériel de construction à travers la Manche et de
le monter ensuite. Il dispose à cet effet d'un effectif de
500 officiers et de 10 000 hommes. Les éléments les
plus importants, les fondations, sont les caissons en
béton armé Phoenix de 5 000 tonnes, chacun
de 60 mètres de long. À l'intérieur de leur
protection, des voies et des jetées flottantes soutenues
par des pontons constituent les quais sur lesquels les cargos,
les péniches de débarquement et autres navires
amphibies doivent se rendre. Dans le secteur de
débarquement de chaque division, cinq brise-lames doivent
être créés pour fournir un mouillage
protégé. Connus sous le nom de Gooseberries,
ils mesurent chacun 7,2 kilomètres de long et sont
construits en coulant 60 blockships.
- Deux jours après le début de l'invasion, le 08
Juin 1944, au large de Varreville, Saint Laurent, Arromanches,
Courselles et Ouistrehan, des môles artificiels sont
posés pour fournir un mouillage abrité temporaire
permettant de débarquer des approvisionnements sur les
plages pendant la construction des brise-lames Mulberry.
Parmi les navires coulés comme brise-lames figurent le
vieux cuirassé français Courbet, le croiseur
léger néerlandais Sumatra, le vieux
cuirassé britannique Centurion, le navire
antiaérien Alynbank et plus tard le croiseur
léger endommagé H.M.S. Durban. Le dimanche
11 Juin 1944, les môles des deux ports Mulberry sont
posés et quatre petits ports de plage à
l'intérieur des brise-lames Gooseberry sont en
activité, le seul retard de ces derniers étant
causé par les tirs d'artillerie côtière
allemande de Quinville adjacente à Utah Beach. Au
total, plus de 5 000 navires de guerre et navires marchands
doivent utiliser les ports artificiels, une prouesse logistique
et technique colossale des marines alliées. Le
commandement suprême des Alliés n'a cependant pas
prévu des catastrophes naturelles
imprévisibles.
- Le matin du 19 Juin 1944, un avertissement est donné
concernant des vents de front d'ouragan. Les pires tempêtes
d'été depuis 1900 s'abattent sur la Manche. De
forts vents du nord-ouest soulèvent de grands vents
roulants le long de la côte normande qui submergent
bientôt le Mulberry américain à Saint
Laurent. Plus de 800 navires, péniches de
débarquement, remorqueurs et chalands sont
endommagés ou coulés.
- Le mercredi 21 Juin, un ouragan s'est installé et le
Mulberry B commence lui-aussi à se briser. Les
brise-lames flottants connus sous le nom de bombardons se
détachent. Les navires se détachent. La mer
déchaînée projette les navires de transport
de troupes contre les quais. Les blockships évitent le
pire. Cette tempête fait autant de victimes que le premier
jour de l'invasion.
- Outre les intempéries, la navigation alliée est
menacée par les batteries côtières
allemandes, les quelques avions de la Luftwaffe et les
navires de guerre de la Kriegsmarine. Le plan de
défense des mouillages de la flotte d'invasion consiste
à éliminer les champs de mines allemands et
à repousser les attaques navales allemandes. La principale
menace pour les mouillages réside dans le secteur Est
où de fortes forces allemandes sont présentes
à l'Est de l'Orne et au Havre. Le haut commandement
anglo-américain forme donc l'East Flank support
squadron. Dirigé par le navire antiaérien
H.M.S. Locust, 71 bateaux, principalement des
péniches de débarquement armées et des
vedettes motorisées, dotés de 240 officiers et de 3
000 hommes, doivent assurer la sécurité.
- La ligne de sécurité vers la mer est
constituée de dragueurs de mines appuyés par des
destroyers, chacun ancré à cinq encablures (925
mètres) de distance. Cette ligne est parallèle
à la côte et à six nautiques. Une double
ligne de patrouilleurs s'avance à six nautiques vers le
Nord depuis Ouistrehan et l'estuaire de l'Orne, puis s'incurve
à deux nautiques vers le Nord-Ouest jusqu'à la zone
maritime où opèrent les patrouilles de
défense navale. La première ligne est
constituée de péniches de débarquement
ancrées à 3,5 encablures de distance, tandis que la
deuxième ligne est constituée d'une vedette
armée (ML) pour deux péniches de
débarquement de la première ligne. Lorsqu'aucune
alarme n'est en vigueur, chaque ML couvre une des deux
péniches de débarquement. Si l'alarme est
déclenchée, elles brisent la ligne
extérieure et comblent l'espace entre les deux
péniches de débarquement qui leur sont
attribuées. Ce système est appelé la
Trout-Line.
- La mise en place nocturne de la Trout-Line est un
événement qui nécessite une synchronisation
très précise. Si les lignes se forment trop
tôt, les bateaux risquent d'être bombardés par
l'artillerie côtière allemande. Pour la même
raison, il faut la démanteler avant l'aube. La
Trout-Line est mise en place pour la première fois
le 28 Juin 1944. Ce système défensif
représente un sérieux obstacle pour les forces de
surface allemandes et le K-Verband.
Glossaire
Source : HITLER'S SECRET COMMANDOS
