H.M.S. "Fidelity" (ex S.S. "Le Rhin")


H.M.S. Fidelity
H.M.S. "Fidelity"


Type
Navire de service spécial
Chantiers de Construction
H. & C. Grayson Ltd., Garston, Liverpool
Terminé
1920
Mise en service
24 Septembre 1940
Caractéristiques techniques
Longueur : 82,29 mètres
Largeur : 12,49 mètres
Tirant d'eau : 6,09 mètres
Déplacement : 3120 tonnes
Déplacement GRT : 2456 tonnes
Propulsion
1 x moteur 3 cylindres triple expansion
1 x hélice
Vitesse maxi
10,5 nœuds
Armement
4 × canon de 100mm
4 x mitrailleuse 40mm A.A.
4 × tube lance-torpilles de Ø 533mm
M.T.B. 105
LCV 752 et LCV 754
2 x OS2U Kingfisher
Équipage
280 hommes
Commandant
L.V.C. A.M. Peri C. de G., pseudo Temp. Cdr Jack Langlais RN, pseudo. Ensign Costa
Victimes/Survivants
328 + 45/10

- Achevé pour M. & C. Grayson par MacKie & Baxter de Glasgow en 1920, le cargo "Le Rhin" est acquis par la Compagnie de Navigation Paquet de Marseille en 1923, et est affecté successivement à ses lignes de Dakar, Casamance, Mer Noire et Maroc. Au début de la guerre, il est affrété par le Service de renseignement colonial français et effectue plusieurs opérations en Indochine avant de revenir en Méditerranée au printemps 1940. Toujours commandé par son capitaine de longue date, le Capitaine René Cannebottin, l'équipage est désormais composé d'un Lieutenant de Vaisseau Claude Peri, soi-disant officier du W/T mais en réalité un 'aventurier d'origine corse' et un membre du service de renseignement spécial français, ainsi que de sa prétendue maîtresse Madeleine Guesclin, une experte en explosifs qui aurait succombé à une maladie pulmonaire. En Mai 1940, alors que Le "Rhin" se trouve à Las Palmas aux Canaries, Peri et un de ses collègues fixent des charges de plastic (acquis auprès des Britanniques, une invention très récente à l'époque) sur la coque du cargo allemand "Corrientes", le laissant gravement endommagé. Cependant, le moment décisif de Peri est encore à venir. Apprenant la chute de la France à Marseille le 19 Juin, il prend le contrôle du "Rhin" et fait route vers Gibraltar avec ceux qui veulent continuer la guerre contre l'Allemagne. Parmi eux se trouve Cannebottin, qui deviendra l'officier de navigation de Peri. Pour faire bonne mesure, Peri s'approprie également tous les entrepôts, les cargaisons à quai et les munitions qu'il peut trouver, 'utilisant des arguments assez forts tels que des grenades à main et des revolvers pour vaincre l'esprit peu coopératif du responsable du port et des dockers'. À Gibraltar, Peri trouve une oreille attentive à sa défection en la personne du Vice-Admiral commandant la Force 'H', Sir James Somerville, qu'il persuade de son désir ardent de se ranger du côté des Britanniques. Vêtu de l'enseigne bleue de la Royal Naval Reserve, "Le Rhin" rejoint les docks de Barry, au sud du Pays de Galles, le 04 Août. Invité par le Vice-Amiral Emile-Henri Muselier à rejoindre les forces françaises libres, Peri refuse catégoriquement, affirmant que "Le Rhin" combattra sous le pavillon blanc et sous aucun autre. Peri est un homme qui a l'habitude d'obtenir ce qu'il veut et une réunion avec Muselier aboutit à un 'accord à l'amiable' qui permet au "Rhin" de rejoindre la Royal Navy le 24 Septembre 1940 sous le nom de H.M.S. "Fidelity". Peri et ses officiers adoptent tous des pseudonymes, le premier devenant le capitaine de corvette temporaire Jack Langlais (Tack l'Anglais); d'autres noms sont proposés à l'Amirauté, notamment Drake et Marlborough, mais la Royal Navy s'oppose à ce que l'on se présente comme Horatio Nelson. Son refus de prendre la mer à bord du "Fidelity" sans Madeleine Guesclin (rebaptisée Madeleine Barclay) oblige l'Amirauté à l'envoyer suivre un cours d'officier WRNS à Greenwich. Barclay retourne ensuite à bord du "Fidelity" avec le grade de premier officier (équivalent à celui de lieutenant-commandant, RN), ce qui lui vaut la distinction d'être la seule Wren affectée à un service actif en mer pendant la Seconde Guerre mondiale.
- Après une conversion initiale en 1940-1, le "Fidelity" retourne en Méditerranée à l'été 1941, effectuant plusieurs missions en Septembre et Octobre pour débarquer des agents sur les côtes d'Algérie et du Sud de la France et sauver des aviateurs britanniques de cette dernière. À la fin de l'année 1941, il est destiné à des opérations amphibies dans l'océan Indien après la nomination de l'Admiral Somerville au commandement de l'Eastern Fleet. Cependant, des défauts mécaniques et une nouvelle conversion impliquant l'ajout de deux supports de canon, de canons Oerlikon, de tubes lance-torpilles, d'un Asdic et d'un radar le maintiennent au port pendant une année supplémentaire. Pendant ce temps, le comportement excentrique de son commandant continue de susciter des interrogations. La cargaison originale de thé, de café, de ciment et de sucre du "Rhin" a été vendue, le produit de la vente étant affecté à Peri. Insistant sur le fait que 'pas un centime ne devait aller au Général de Gaulle', Peri renonce finalement à la majorité en faveur du Fonds Spitfire de la RAF, conservant une petite somme pour son usage personnel. De plus, une année d'oisiveté forcée n'a rien fait pour le tempérament de Peri ou le moral d'un équipage très motivé et impatient de poursuivre la guerre. Des rapports font état de passages à tabac, d'isolement sans nourriture ni eau, d'un homme enchaîné nu à une chaudière en fonctionnement en guise de punition, d'un suicide des plus douteux (trouvé dans l'eau et considéré comme s'étant suicidé par noyade bien qu'il soit criblé d'impacts de balles, Peri estime que 'le mort a dû se tuer en plein vol') et une bagarre entre Peri et son maître d'équipage, au cours de laquelle ce dernier a failli être tué, conduit l'Amirauté à recommander que le "Fidelity" ne s'embarque que pour des opérations 'conformes au tempérament de son commandant'. C'est donc avec un mélange de soulagement et d'inquiétude que le H.M.S. "Fidelity" reçoit l'ordre d'appareiller pour l'océan Indien le 18 Décembre 1942, l'officier de liaison sortant, le Lt P. Whinney, se voyant offrir par Peri un étui à cigarettes gravé 'en souvenir du caractère noir de Jacques Langlais'. En peu de temps, il rejoint le convoi ON 154 en direction du Sud avec un équipage principalement britannique de 276 hommes, cinquante et un commandos de la Royal Marine et le premier officier Barclay.

- Peu avant Noël 1942, les groupes "Ungestüm" et "Spitz" sont formés en une seule ligne de patrouille pour intercepter le dernier convoi lent ON 154. La tâche des U-Boote est fastidieuse, car le convoi est fortement retardé par la météo et les problèmes mécaniques des deux destroyers du 1th Escort Group (EG-C1), le N.C.S.M. "St Laurent" et le H.M.S. "Burwell". Mais la patience des U-Boote dans des conditions exécrables sera amplement récompensée. Les défauts du "Burwell" sont tels qu'il n'appareille pas, laissant la défense du convoi au "St Laurent" (officier supérieur) et à cinq corvettes canadiennes ("Battleford", "Chilliwack", "Kenogami", "Napanee" et "Shediac") qui ne possèdent ni HF/DF ni opérateurs experts pour leurs nouveaux radars de type 271. La puissance de la force d'attaque (qui s'est rapprochée après que l'ON 154 est repéré par l'U-664 le 26 Décembre), la vitesse lente du convoi, l'absence de couverture aérienne et l'inexpérience d'un groupe d'escorte épuisé transforment le passage de l'ON 154 en une épreuve que peu d'autres convois ont subie pendant la guerre. Trois navires marchands sont coulés dans la nuit du 27 au 28, et un quatrième succombe aux dommages plus tard dans la journée. Bien que le "St Laurent" réussisse à couler l'U-356, ces attaques ne sont qu'un avant-goût des ravages causés la nuit suivante lorsque neuf navires sont coulés ou endommagés, ces derniers étant achevés par le reste de la meute. Bien que l'ON 154 soit renforcé par les destroyers "Milne" et "Meteor" le 29 Décembre, une grande partie de l'escorte manque cruellement de carburant et se prépare à une répétition de la nuit précédente. À leur grand soulagement, ce scénario ne s'est jamais produit, car Donitz annule l'attaque. Bien que le pétrolier et ravitailleur Type XB l'U-117 se trouve à 130 milles au Nord, de nombreux U-Boote sont eux-mêmes à court de carburant, ce qui fait du retrait l'option la plus prudente.
- Au départ, le H.M.S. "Fidelity" n'a qu'un rôle d'observateur dans cette bataille unilatérale, mais cela ne doit pas durer. Naviguant à l'arrière de la cinquième colonne, dans l'après-midi du 28 Décembre, il se rapproche du "St Laurent" après une demande désespérée de fournir une couverture aérienne en utilisant l'un de ses deux hydravions "Vought Kingfisher". Cependant, la tentative de lancer un avion dans une mer formée coûte presque la vie à ses deux membres d'équipage et met le H.M.S. "Fidelity" sur la voie du désastre. Alors que le "Fidelity" vire au vent pour tenter d'aplatir la mer pour faciliter le décollage, le "Kingfisher" prend son aile dans le sillage du "St Laurent" alors qu'il est en train d'être basculé il chavire immédiatement. La perte de l'avion n'est rien de plus qu'une déception, mais l'explosion de sa charge de profondeur à faible profondeur cause de graves dommages aux condenseurs du "Fidelity" et le laissant à la dérive, la première de nombreuses pannes au cours des prochains jours. Pendant plusieurs heures, le "Fidelity" est protégé par le "Shediac", mais ce dernier reçoit l'ordre de rejoindre le convoi aux premières heures du 29 et l'aube trouve le navire de Peri seul et avec de la vapeur pour pas plus de deux nœuds. Il est aperçu dans cette situation difficile à 06h23 par le "Milne", puis se déplaçant à toute vitesse dans le sillage du carnage de la nuit précédente pour renforcer l'escorte de l'ON 154. L'Amirauté et de nombreuses escortes captent un certain nombre de transmissions radio du "Fidelity" au cours des vingt-quatre heures suivantes, au cours desquelles ses deux péniches de débarquement sauvent environ quarante-cinq survivants de l'"Empire Shackleton" (coulé par l'U-435 le 29. ), y compris le commodore du convoi, le Vice-Admiral Wion de Malpas Egerton. Des pannes intermittentes, le lancement de la vedette rapide du navire (MTB 105) lors d'une patrouille anti-sous-marine de nuit, des observations de sous-marins et son désir de faire voler l'enseigne de l'Axe sont tous signalés, le dernier incitant une réponse de l'Amirauté lui interdisant de faire quoi que ce soit de la sorte. Abandonnant tout espoir de rejoindre le convoi, Peri dirige le "Fidelity" vers le Sud vers les Açores. On ne peut qu'imaginer la frustration avec laquelle il le fait.
- Le MTB 105, souffrant de problèmes de moteur, est assez proche pour assister à une attaque du "Fidelity" par l'U-615 (Kptlt Ralph Kapitzky) peu avant minuit le 29, le deuxième commandant à l'avoir dans sa ligne de mire ce jour-là après l'Oblt.z.S. Wolfgang Leimkuhler (U-225) qui curieusement décide que ce 'leurre de U-Boot' ne vaut pas la peine. Vaincues peut-être par les filets anti-torpilles du "Fidelity" - sans doute montés par Peri en raison de la vitesse réduite de son navire - cinq torpilles de l'U-615 n'ont pas d'effet, bien qu'une explosion séparée (peut-être "Fidelity" larguant des charges de profondeur) soit notée à la fois par l'U-615 et le MTB 105. Déconcerté par le gaspillage de tant de torpilles, Kapitzky interrompt l'action, mais "Fidelity" vit désormais en sursis. Dans l'après-midi du 30, l'U-435 du Kptlt Siegfried Strelow l'aperçoit alors qu'il ne fait pas plus de cinq nœuds, ses filets anti-torpilles étant vraisemblablement rangés. Se méfiant de ce navire inhabituel et l'identifiant correctement comme le "navire-leurre" signalé par l'U-225 la veille, Strelow tire deux torpilles en l'espace d'une minute, mettant fin à l'extraordinaire carrière du "Fidelity".
- Extrait du KTB de l'U-435.




42°05'N 28°05'O selon une autre source


- Mis à part le journal de bord de Strelow, on ne sait rien du "Fidelity" une fois qu'il perd le contact avec le MTB 105 peu après les attaques infructueuses de l'U-615 dans la soirée du 29. Les transmissions radio du "Fidelity" sont captées par le MTB 105 au cours de cette nuit et le lendemain matin, mais trop faiblement pour être déchiffrables. Comme aucun survivant du "Fidelity" lui-même n'a été secouru, les informations concernant sa disparition sont limitées au journal de guerre de Strelow. Celui-ci révèle seulement que le "Fidelity" a subi deux impacts de torpilles à l'avant en l'espace d'une minute, suivis d'une détonation majeure trois minutes plus tard, et qu'il a coulé peu après, laissant plusieurs centaines de survivants dans l'eau.
- Lorsque la nouvelle du naufrage du "Fidelity" parvient à Londres, les Forces Françaises libres sont promptes à vanter les mérites de l'ancien 'navire-piège' "Rhin", notant dans une dépêche que 'tous les hommes et le matériel à bord ont glorieusement disparu dans la région des Açores en Décembre 1942 alors qu'il escortait un convoi attaqué par des sous-marins allemands'. Cependant, ce n'était pas tout à fait la fin du FNFL en ce qui concerne le "Fidelity". Peu après sa perte, l'Amiral Philippe Auboyneau de la FNFL s'adresse à l'Amirauté au sujet de la cargaison originale du "Rhin", cédée en 1940 par 'Jack Langlais' au profit de la RAF et de sa propre poche. Un mémorandum interne d'Avril 1943, motivé par cette demande et apparemment rédigé par un francophile, rend compte de l'ambiguïté du statut juridique du "Rhin", de ses relations avec la Royal Navy et de l'exaspération de l'Amirauté face à l'affaire "Fidelity" : 'Il n'est pas utile de couper les cheveux en quatre pour décider si un certain type de Français a le droit, au nom d'un type de France indéfini, de bénéficier de ce qui pourrait ne pas être un vol commis par un type de Français inhabituel contre un autre type de Français'.

- Bien qu'aucun survivant du naufrage n'ait jamais été retrouvé, le pilote et l'observateur du deuxième "Kingfisher" du "Fidelity" et huit membres d'équipage du MTB 105 ont été secourus par la corvette H.M.C. "Woodstock" lors de la recherche de survivants et d'épaves quelques jours plus tard. La mystique du "Fidelity", les excentricités de son commandant et le fait qu'il y ait eu des survivants dans ses embarcations auxiliaires ont fait que les langues se sont déliées, à tel point que le rapport laconique de l'Amirauté sur la perte présumée du "Fidelity" n'a fait qu'alimenter les spéculations. Des articles de presse publiés en Mars et Octobre 1943 et une lettre publique écrite par la veuve du commodore du convoi, le Vice-Admiral de Malpas Egerton, amènent l'Amirauté à publier une nouvelle lettre aux proches en Novembre 1943 dans le but de dissiper certaines des rumeurs les plus folles qui circulent alors. Le problème pour l'Amirauté, cependant, était que personne du côté des Alliés n'était en possession des faits les plus simples concernant la perte du "Fidelity". Non seulement la nature de sa disparition avait empêché le "Fidelity" de rapporter l'attaque, mais la transmission radio de Strelow de 19h48, le 30, était l'une des douzaines relatives à la décimation de l'ON 154 déchiffrée par Bletchley Park au cours des quarante-huit heures suivantes. La référence de Strelow à un 'leurre de U-Boot' n'incite pas non plus l'Amirauté à établir un lien entre elle et l'U-435. Tout ce que l'Amirauté pouvait tirer de ses propres renseignements, obtenus auprès des survivants de l'U-615 du Kptlt Ralph Kapitzky après qu'il se soit sabordé dans les Caraïbes en Août 1943, était que le "Fidelity" avait été coulé le 31 Décembre par l'U-435, mais même cela était faux dans la mesure où l'attaque avait en fait eu lieu le 30. Ce n'est que lorsque les archives allemandes ont été examinées après la guerre que les Alliés ont obtenu des informations précises sur la date, la position et les circonstances du naufrage.
- Le message reçu par l'U-435 du B.d.U. à 19h52 le 30 est en quelque sorte le plus sinistre de tous les journaux de bord des U-Boote. Il n'est pas surprenant que l'on ait suggéré, à au moins une occasion, qu'il s'agissait en fait d'un ordre de massacre des survivants de ce qui avait été identifié auparavant comme un 'leurre de U-Boot'. Des questions subsistent quant au silence presque total de Strelow sur les mouvements de l'U-435 entre 16h46 et 21h00, ainsi que sur d'autres anomalies telles que la différence de temps entre les entrées de 19h48 et 19h52, car il est impossible que le message du U-435 de 19h48 ait été envoyé, reçu, décrypté, réfléchi et répondu en code en l'espace de quatre minutes. Toutefois, en l'absence de preuves, l'idée d'une atrocité reste du domaine de la conjecture, que la perte de Strelow et de tout son équipage en Juillet 1943 rend sans doute définitive.



Libre traduction par l'auteur du site des pages 315, 316, 318 et 319 de l'ouvrage "U-Boat Attack Logs" de Daniel Morgan & Bruce Taylor chez Seaforth Publishing.
Sources : le Net


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