Kéroman I & Kéroman II
- Après avoir été
informé le 07 Novembre 1940 qu'il devait construire des
U-Bunkers pour la Marine à Lorient, le Dr Todt se rend
à Lorient les 15 et 16 Novembre.
- Avec l'arrivée du Dr Todt, les premières
études de sol commencent.
- Le premier plan d'aménagement prévoit la
réparation de douze sous-marins. La péninsule de
Kéroman est choisie comme site.
- Le sol de construction est constitué de granit à
différentes hauteurs, au-dessus desquelles se trouvent des
couches d'argile et de boue.
- L'objectif premier pour la construction du bâtiment est
de l'achever le plus rapidement possible afin d'éliminer
le danger pour les sous-marins non protégés dans le
port, c'est pourquoi il est décidé d'innover dans
la construction du bunker.
- Afin d'éviter des travaux de terrassement coûteux
et importants dans le sol en granit, un système de
remorquage (slip) est mis en place, sur lequel les sous-marins
sont tirés sur une plate-forme de transfert. Sur cette
dernière, les bateaux sont poussés dans l'une des
douze alvéoles, où ils peuvent être
réparés et protégés des bombes.
- Les avantages décisifs de cette installation se situent
dans la courte période de construction, puisque les
travaux de terrassement particulièrement complexes dus au
sous-sol rocheux peuvent être limités à
descendre jusqu'à -10,65 mètres, moins de
terrassements sont nécessaires par mètre
carré de surface bâtie avec ce type de construction
qu'avec une construction de type alvéole à
flot.
- De plus, un sous-marin peut être amarré plus
rapidement avec un système de remorquage qu'avec des quais
conventionnels. Un autre avantage de ce système est la
possibilité d'un amarrage très court, le sous-marin
est seulement tiré vers le haut du slip, mais pas
entré dans une alvéole. Le bateau peut être
vérifié par exemple pour des fuites peu de temps
avant le départ, un amarrage aussi court ne dure
qu'environ 30 minutes. Un processus d'amarrage dans un bassin
à flot du K III prend entre 2 et 4,5 heures, selon le
niveau d'eau et le nombre de pompes utilisées.
- L'inconvénient est la grande surface non
protégée de la plate-forme mobile entre KI et KII.
Si la plate-forme mobile est mise hors service par l'ennemi, tout
le système tombe en panne, les sous-marins restent
enfermés dans leurs alvéoles.
- Les premiers plans du complexe de bunkers sur la
péninsule de Kéroman sont présentés
à Adolf Hitler lors d'une visite aux batteries lourdes du
Cap Gris Nez le 21 Décembre 1940. En Février 1941,
les premiers travaux de construction commencent. Pour la
construction des bunkers de Kéroman, une joint-venture
(coentreprise) entre les sociétés Philipp Holzmann
de Francfort et Siemens Bauunion est signée par l'OT
Oberbauleitung. Le directeur du consortium chez Holzmann est le
directeur Imm et Dr. Kesselheim, et le chef du bureau technique
est l'ingénieur diplômé, Rehfeldt. Au Siemens
Bauunion, le chef est l'ingénieur diplômé,
Kessler.
- Au début, l'accent est mis sur la construction de
"Kéroman I", et à partir de Mai 1941, la
construction de "Kéroman II" est également
commencée. Devant le slip, un mur de palplanches est
enfoncé, dans la protection duquel le sol peut être
excavé. Pour ce faire, l'OT a procédé
à un dynamitage sous l'eau. Des foreuses sont
utilisées pour percer les trous de mine puis les
évacuer avec les conduites à haute pression de la
Lorient Luftschutzkompanie (Compagnie de Défense
aérienne). Afin d'enlever rapidement le sol excavé
du chantier de construction, l'OT a posé des voies
étroites (écartement 90) dans la fosse
d'excavation, sur lesquelles les trains Lorenz le remontent de la
fosse d'excavation, qui s'approfondit de jour en jour, afin de
transporter la roche excavée du chantier de construction.
Les trains Lorenz sont déchargés à environ
10 km à l'Ouest de Lorient, près de
Ploemeur.
Train Lorenz, ici à Bordeaux (©
Bundesarchiv)
- Comme le sol porteur de la presqu'île
de Kéroman est très accidenté, une partie de
l'U-Bunker avec sa semelle n'atteint plus la roche et doit
être construite sur des pilotis.
- Toutes les pièces en acier, telles que les poutres
Melan, le système de remorquage avec chariot de quai, la
table de transfert, la porte de quai, etc. sont
transportées à Lorient par rail. Les pièces
encastrées sont montées sur un poste d'amarrage
séparé près de la gare, chargées sur
des barges et transportées jusqu'à la
péninsule de Kéroman.
- Des pénuries notables de travailleurs ou de
matériaux de construction n'existent pas à Lorient.
La construction progresse rapidement. Les premiers essais ont
lieu le 25 Août 1941 avec U-123
(K.L. Reinhard HARDEGEN).
L'inauguration officielle de l'installation de "Kéroman I"
a lieu le 01 Septembre 1941 après sept mois de
construction. Puis en Décembre 1941, l'achèvement
de l'installation "Kéroman II".
- Le KTB du Commandement du Groupe de la Marine Ouest
écrit le 04 Novembre 1941 : « Le commandant de la
Marine en Bretagne rapporte que la poursuite de la construction
et de l'extension de la base de Lorient est remise en question en
raison de la livraison tardive des matériaux de
construction nécessaires (en particulier les
systèmes de chauffage). La demande du commandant pour la
livraison immédiate du matériel manquant est
fortement appuyée ici, puisque l'importance de la guerre
sous-marine est clairement définie par l'ordre du
commandant. »
- En 1942, deux bâtiments sont ajoutés à
"Kéroman I et II", pour assurer l'alimentation
électrique et des réservoirs d'eau et d'huile
combustible sous la protection du bunker, ils ont pour des
dimensions de 35 mètres de large et 81,7 mètres de
long, ils sont érigés sur le mur Sud de
"Kéroman I". Les murs extérieurs ont entre 1,5
mètre et 3 mètres d'épaisseur, le plafond
3,5 mètres d'épaisseur. L'extension comprend des
groupes électrogènes de secours, le système
de chauffage central et deux réservoirs de 150 m³
pour l'huile usagée et l'huile de cale, un
réservoir de 200 m³ pour l'huile moteur, un
réservoir de 200 m3 pour l'huile lubrifiante et deux
réservoirs de 200 m³ pour le retour du mazout. Plus
tard, ces réservoirs combinés sont
complètement convertis au mazout. Parallèlement au
mur Est de "Kéroman II", une extension de 57,42
mètres de long et 24 mètres de large est construite
au tournant de l'année 1942/43 pour protéger un
réservoir de fuel-oil, un réservoir d'eau et un
transformateur. Les murs latéraux ont 2,5 mètres
d'épaisseur, le plafond 3,5 mètres
d'épaisseur. Le réservoir de mazout a une
capacité de 1350 m³, ce qui est suffisant pour la
lubrification de six bateaux Type IX-C-40 (214 t chacun). Le
gasoil est pompé dans les alvéoles de
"Kéroman Ill" par des canalisations souterraines de
Ø 90 mm (quatre dans les bassins à flot, deux dans
les deux alvéoles asséchables), où les
bateaux peuvent être ravitaillés. Dans
"Kéroman I et II" aucun ravitaillement en gasoil n'a
lieu.
- Le réservoir d'eau contenait 1350 m³ d'eau douce.
En plus des ateliers, il alimente également la chaufferie
dans l'extension de la centrale électrique de
"Kéroman I". Le réservoir est alimenté par
une conduite d'eau provenant de Ploemeur.
- La structure 'Fangrost' au-dessus de
l'installation "Kéroman I et II" n'est pas
construite.
- Au début du remorquage, le bateau entre dans le slipway.
Sa porte est fermée et le niveau de l'eau est
abaissé, le bateau est placé sur un bâti
fixé au chariot. Cette manœuvre est soutenue par
deux ponts roulants. Le bateau est fixé sur le chariot
à l'aide de supports latéraux. Le chariot est
hissé sur la rampe de 158 mètres de long (pente
1:10) avec un treuil d'une force de 220 CV. À
l'extrémité supérieure de la cale, le bateau
est tiré sur la plate-forme de transfert par un tracteur
de 25 hp. Ici, il est placé sur un chariot de transfert de
48 mètres de long et 13 mètres de large, qui pousse
le bateau devant l'alvéole de réparation choisie.
La locomotive de 25 HP pousse le sous-marin dans l'alvéole
après l'avoir poussé latéralement devant
l'alvéole de réparation. Un tel processus
d'amarrage prend entre 46 et 60 minutes, selon l'alvéole
dans laquelle le bateau est rentré.
- Dans "Kéroman II", à côté des sept
alvéoles pour sous-marins, il y a une huitième
alvéole qui sert d'espace de stockage pour les deux
plates-formes de transfert. L'espace au-dessus des plates-formes
mobiles sert à la construction d'une caserne pour 1000
hommes.
- Un sous-marin à remorquer ne peut excéder une
longueur de 86,72 mètres, une largeur de 9 mètres
et une hauteur de 10,25 mètres. Les sous-marins de Type
IX-D, X-B (trop longs) et XXI (trop hauts) ne peuvent pas
utiliser le système. Comme la hauteur intérieure
des alvéoles n'est pas suffisante pour tirer les
périscopes, une grue d'une tonne est installée sur
le toit de "Kéroman II" à cet effet.
- Les moteurs des grues sont fournis par Siemens, les grues
elles-mêmes par la société Eggers, Hambourg.
Les grues ont une vitesse de déplacement de 50 m/min, une
vitesse directionnelle de 30 m/min et une vitesse de levage de 3
m/min.
- Chacune des douze alvéoles peut être fermée
par une porte blindée de 12 x 12,5 mètres de large.
Les portes pèsent 108 tonnes. Elles se composent de deux
plaques de blindage de 20 mm d'épaisseur, espacées
de 960mm. Pour la circulation des passagers, il y a deux
portillons.
- L'entrée du slipway devait également être
protégée par un portail blindé. Il n'a
jamais été mis en place. Seul le treuil
d'entraînement est installé.
- L'alimentation électrique du complexe de Kéroman
(K I - III) est complètement sous la protection de
l'U-Bunker. Normalement, le courant arrive par une ligne à
haute tension de 60000V au poste de transformation à
l'arrière de Kéroman II. Ici, le courant est
transformé en 6000V et ensuite transmis à la
centrale électrique de "Kéroman I". Ici, il y a de
nouveau transformation en une tension de service de 220V/380V. En
cas de panne de courant, la centrale dispose de cinq groupes
électrogènes. Les moteurs des unités sont
des moteurs à combustion interne MAN-6-cylindres à
quatre temps à injection automatique. Ils ont une
puissance de 600 ch à 600 tr/min. Chaque moteur a un
alternateur produisant 580 kW en dessous de 6300V. Pour
démarrer les moteurs avec de l'air comprimé, un
compresseur Junkers est disponible. De plus, trois
chaudières à vapeur sont utilisées pour
produire de l'électricité, fournissant 12 kg de
vapeur par cm³. Ceci est utilisé pour alimenter un
TurboDynamo à 3000 tr/min. Le générateur de
courant alternatif qui lui est raccordé a une puissance de
2500 kW à 6600 V. Deux compresseurs d'air d'une
capacité de 1463 m³/h et une installation de
distillation d'eau sont également installés dans la
centrale. L'eau distillée est nécessaire pour les
batteries de sous-marins.
Traduit librement de l'ouvrage "Die deutschen Ubootbunker und
Bunkerwerften" de Sönke Neitzel chez Bernars & Graefe
Verlag.